‘I stood there, and I told myself : I can’t believe this is my life right now, how did I get so lucky to be here, because this is awesome !’ Jenna Neil Valise prête, réveil réglé à 5h du matin, sandwich okay, téléphone chargé. « Tout est opérationnel », je me répète dans l’obscurité. Le sommeil se fait attendre alors que je repasse en revue ce que j’aurais pu oublier de prendre. Le passeport, les billets de train, le chargeur, la brosse à dents, les photos, le billet de bateau, les adaptateurs, le passeport, la brosse à dents, les photos… 1h du mat les yeux grands ouverts, je me demande ce qu’il m’a pris de m’inscrire dans une fac irlandaise. Premièrement, je ne parle pas bien anglais, deuxièmement, j’ai tendance à être phobique sociale. Un voyage de 36h m’attend avant d’arriver à Dublin. 1 train, 2 trains, 3 trains. 1 taxi, 2 taxis, 5 taxis. 18h de bateau. 5h du mat. Ironiquement Heroes de David Bowie résonne dans la piaule que je m’apprête à quitter pour plusieurs années. Une vingtaine d’heures plus tard - spoiler alert : j’ai survécu- je m’apprête à descendre du bateau à Rosslare, lorsque qu’une jeune fille avec un sac à dos énorme vient s’asseoir à côté de moi en attendant le retour sur la terre ferme. Je me présente en baragouinant quelques mots d’Anglais : ‘Hi, I am Charline, where are you going ? Dublin ! Oh great me too, let’s take the train together !’
Elle s’appelle Jenna, est américaine, vient du Maine et a 25 ans. Cela fait deux mois qu’elle voyage en Europe. Elle a parcouru la Grèce, l’Italie, la Hollande… et aujourd’hui l’Irlande. Je la laisserai quelques jours plus tard avant son départ pour l’Ecosse où elle terminera son périple. Pourquoi es-tu à Dublin aujourd’hui ? J’ai toujours voulu venir ici. J’adore les livres et lorsque j’étais enfant, je lisais beaucoup de fictions historiques basées à Dublin. Je n’ai jamais su d’où venaient mes ancêtres, mais j’ai toujours eu en tête l’idée que certains d’entre eux étaient Irlandais. Je sentais une véritable connexion avec ces livres. Pourquoi voyages-tu ? Je ne sais pas exactement pourquoi j’ai voulu commencer à voyager. J’étais venu en Europe avec ma famille et mon lycée, en Slovaquie et en Pologne par exemple, et j’avais adoré. Depuis l’université, j’ai essayé de revenir. Que cherches-tu à travers ce périple ? Je ne cherche pas quelque chose de matériel que je pourrais ramener avec moi. Ce voyage est une introspection qui me sert à apprendre à compter seulement sur moi, sans filet de sécurité. Comment fais-tu pour communiquer ? Lorsque les personnes ne parlent pas anglais, je communique avec des gestes ou en désignant les choses que je veux manger. Dans les lieux où je dois payer quelque chose, même si les gens ne parlent pas bien anglais, ils ont souvent des calculatrices donc ça m’aide à savoir exactement ce que je paye. As-tu eu peur avant de partir ou pendant ton voyage ? J’avais peur d’être nerveuse. Je l’ai été au moment de prendre l’avion pour venir en Europe. Je ne savais pas ce qui allait se passer. Un jour à Athènes, un homme a essayé de voler mon téléphone dans un café ! Mais je n’ai pas eu d’autre de problème. Quels sont tes soucis journaliers ? Avant de partir, je faisais des crises d’angoisse à cause de mon travail dans une chaîne de cafés. Quand je suis arrivée en Europe, l’auberge de jeunesse à Naples n’était plus disponible. Je n’ai pas paniqué sur le moment, mais j’étais toujours anxieuse. J’ai réservé dans un autre endroit et replanifié mon itinéraire. Le soir, j’ai eu la pire crise d’angoisse de ma vie, je tremblais et je ne savais pas quoi faire. J’avais prévu un voyage de 4 mois et demi et j’ai décidé de le réduire de moitié. Ça m’a aidé. Je me suis dit que je pourrais économiser plus d’argent ce qui me laisserait une plus grande flexibilité par la suite.
Es-tu moins anxieuse aujourd’hui ? Oui totalement ! T’es-tu déjà sentie seule durant ton voyage ? Oui, quand je suis dans le train pour un long trajet et que je dois me distraire. Lorsque je vois des couples aussi, j’ai envie de leur dire : ‘Go away, I don’t want to see you, you are reminding me that I am by myself !’ (rires) Mais j’ai l’habitude d’être seule. Trouves-tu de grandes différences entre chaque population que tu as rencontrée ? Pas vraiment, je pense que le fondement de l’humanité est bon. Toutes les personnes que j’ai rencontrées ont été gentilles et serviables. Il y a bien sûr quelques différences culturelles, mais je pense que tout le monde est incroyable et j’aime les gens. Je me dis : ‘Hey, je sais qu’on ne peut pas vraiment discuter, car on ne parle pas la même langue, mais essayons’. Quel est ton meilleur souvenir ? C’est à Dublin ! Avec des jeunes de l’auberge de jeunesse, on cherchait un pub authentique et typique avec de la musique irlandaise. L’endroit était bondé, on était super serrés ! On a pris une pinte. Danser ça fatigue, peu importe à quel point je suis mauvaise ! Il y avait des moments où je m’arrêtais pour observer les gens. Tout le monde passait un très bon moment et était positif. C’était tellement fun. Je n’en revenais que c’était ma vie à ce moment-là, et de la chance que j’avais d’être ici ! Quel est ton pire souvenir ? Les premières semaines étaient difficiles. J’entends souvent les gens parler de faire un changement radical dans leur vie. Ils travaillent dans une entreprise et souhaitent se consacrer à la passion qu’ils ont à côté. Ils disent toujours comment c’est génial et que tout à fonctionner pour eux, mais jamais du côté négatif. Après la première crise d’angoisse à l’auberge de jeunesse, j’ai compris qu’il fallait que je traverse cette épreuve afin d’arriver ici, comme une détox. Les back packeuses rencontrent-elles des difficultés particulières ? La chose la plus inconfortable est qu’on te fixe beaucoup, mais en tant que femme, ce serait pareil chez moi. Tu tiens aussi un blog, peux-tu nous en parler ? Il y avait cette bloggeuse voyage très introvertie, réservée et timide qui avait utilisé sa différence pour écrire des articles. La question était : qu’est-ce que j’amène à l’équation ? J’ai décidé d’écrire à propos de l’anxiété. Elle n’aide pas à ‘être’ dans le monde, elle te donne envie de te cacher et d’enfoncer ta tête dans le sol, comme une autruche ! Je voulais aborder quelque chose dont les gens ne parlent pas forcément. Que dirais-tu aux personnes qui hésitent à voyager seules ? ‘Do it !’ Ce n’est pas toujours beau, mais ça le sera. C’est le choix quotidien d’être heureux et de faire des petites choses. Ce sont ces petites choses qui font une véritable différence. »
Lien vers mes deux articles préférés écrits par Jenna :
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